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Le col de Pailhères

  • Altitude : 2001 mètres
  • Département : Ariège (09)
  • Région : Languedoc Roussillon-Midi Pyrénées
  • Catégorie : HC

Montée depuis Ax les Thermes :

Distance : 19,60 km – Dénivelé : 1281 mètres – Pente moyenne : 7 % - Pente maximale : 11 %

  • Longueur : 4/5
  • Paysage : 3/5
  • Difficulté : 4/5
  • Trafic : 4/5

15/20

Location de vélo : Ax Sports Loisirs à Ax les Thermes

Appartenant à l’histoire moderne de la grande boucle, ce difficile col pyrénéen propose un profil que l’on retrouve rarement dans ce massif contrairement aux Alpes : un fort kilométrage proche des 20, des pourcentages réguliers, une large route en très bon état et une arrivée à plus de 2000 mètres. Le col de Pailhères que l’on appelle également Port de Pailhères a été emprunté à cinq reprises (2003, 2005, 2007, 2010 et 2013) en dix ans par le Tour de France qui avait jeté son dévolu sur le département de l’Ariège lors de cette décennie. Si l’on excepte l’arrivée au Plateau de Beille (1790 m) en 2007, cette difficile ascension a toujours été suivie de la montée du Plateau de Bonascre (1380 m). Le record de l’ascension est détenu par Jan Ulrich qui a effectué la montée du versant audois en 44’ 16 lors du Tour 2005.

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En partant d’Ax les Thermes (720 m), le col de Pailhères propose des pourcentages roulants dans sa première moitié qui vont augmenter dans la seconde en offrant de nombreux passages à plus de 10% à partir de la station de sports d’hiver d’Ascou Pailhères (1490 m).

Cette route de l’Aude livre au pied quatre beaux lacets auxquels fait suite un replat à l’entrée d’Ascou (982 m) au kilomètre 4. Le début du col, commun avec celui du Chioula (1431m) que l’on laisse sur la gauche peu avant l’arrivée à Ascou permet de bien s’échauffer en prévision d’un long effort de près de 20 kilomètres.

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Suite à l’intersection avec la départementale menant au sommet du Chioula, la pente s’adoucit et la circulation se fluidifie. La route qui se nomme désormais la D25 devient plus linéaire en contournant le lac de Goulours au 5ème kilomètre.

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La chaussée qui se rétrécie à la sortie du Lac dessine deux virages serrés tout en offrant une légère descente qui permet d’atteindre Lavail avec un peu de vitesse. En remontant le cours de la Lauze, on découvre sur la droite la camping d’Ascou la Forge puis le Fournil de la Forge d’Ascou.

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La sortie de ce hameau permet d’accéder à la D25B qui mène au sommet du col de Pradel (1673 m) ou de virer à droite pour emprunter la route de la Mouline qui se dirige vers l’est. Cette portion sans relief prépare une envolée des pourcentages à partir du 8ème kilomètre qui oblige à tout mettre à gauche lors du franchissement des épingles de la Jassette. Ces 3 kilomètres boisés et sinueux marquent le début des difficultés.

Un dernier replat de 2 bornes au kilomètre 11 précède l’interminable ligne droite de la station de sports d’hiver d’Ascou Pailhères. Cette route dont la largeur accentue l’impression de difficulté décrit alors une grande courbe sur la droite qui permet d’apprécier le domaine skiable en contre bas sur la droite.

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Cette petite station qui offre 20 kilomètres de pistes de ski alpin se situe à une altitude comprise entre 1490 et 1990 mètres. Sa traversée permet d’apercevoir le pic de Trabesou (2364m) puis d’attaquer une série de six lacets aux pourcentages vertigineux. Cette partie sinueuse est la plus intéressante de l’ascension et m’a procuré un immense plaisir.

La rampe finale qui épouse le cours du ruisseau de l’Adorre propose à nouveau une route plus linéaire et des pourcentages qui ne cessent de croitre. Ce final est difficile, la température chute, le vent souffle de face, les pourcentages sont douloureux et le sommet parait s’éloigner à chaque coup de pédale. Un dernier virage sur la gauche qui fait suite au parking du col de Pailhères permet de franchir la barre symbolique des 2000 mètres en danseuse sur un petit développement.

L’arrivée au sommet du Port de Paihlères révèle le versant audois qui plonge vers la Méditerranée. Cet autre versant qui a toujours eu les faveurs du Tour de France permet d’accéder à la station de Mijanes-Donezan (1130 m) après sept kilomètres de descente.

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La révélation Nairo Quintana (6 juillet 2013)

L’arrivée dans les Pyrénées offre la première arrivée au sommet du Tour 2013 et deux gros morceaux placés en fin d’étape le difficile Port de Pailhères et la montée vers Ax 3 Domaines.

Après une première semaine de compétition qui a proposé quatre étapes accidentées (dont deux en Corse) en sept jours de course (et non sept étapes de plaine avec victoire au sprint de Mario Cipollini), le peloton éprouve le besoin de souffler. Il laisse donc partir dès le début d’étape l’échappée du jour formée par Christophe Riblon, Rudy Molard, Jean Marc Marino et Johnny Hoogerland.

« Quintana s’envole »

Au pied du Port de Pailhères que les coureurs atteignent après 131 kilomètres de course, l’écart n’est plus que de 3 minutes. Présentés comme les deux grands favoris de l’épreuve au départ de Porto Vecchio, Chris Froome et Alberto Contador font rouler leurs équipiers qui mènent la chasse en tête de peloton. Mais dès les premières pentes du Port de Pailhères, un petit colombien attaque un peloton pourtant en file indienne et rattrape un à un les fuyards du matin. Ce coureur qui rappelle le grand Luis Herrera est Nairo Quintana, il vole dans le port de Paihlères qu’il franchit en tête 1’05 devant le groupe des favoris. Le tempérament offensif du coureur de la Movistar ne sera pas récompensé puisque le colombien est avalé par le rouleau compresseur Sky dans la montée vers Ax 3 Domaines. Ritchie Porte et Chris Froome s’envolent à 5 kilomètres de l’arrivée et assomment la concurrence. Alejandro Valverde termine à 1’08 de l’anglais à nouveau vainqueur lors de la première arrivée au sommet et Alberto Contador à 1’45. Tout comme l’US Postal dans les années 2000, la Sky écrase ses adversaires en profitant de la première étape de montagne pour s’emparer du maillot jaune et placer Riche Porte à la deuxième place 51’ derrière son leader.

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Le port de Pailhères révèle donc au grand public Nairo Quintana qui a attaqué de loin dans un style de pur grimpeur Colombien. Grâce à sa neuvième place sur la ligne le coureur de la Movistar entre dans le top 10, endosse le maillot blanc et se rapproche du maillot à pois. Le coureur sud-américain profitera des pentes du Ventoux, de l’Alpe d’Huez, et du final d’Annecy-Semnoz pour remonter à la deuxième place du classement général mais sera battu par l’intouchable kenyan blanc. Quintana se console en arrachant à Froome la veille de l’arrivée à Paris la tunique dont rêvent tous les colombiens le maillot blanc à pois rouges qu’il portera sur les Champs Elysées. Héritier des escarabajos des années 80, Quintana est la révélation du Tour de France 2013.

« Le premier vainqueur colombien d’un grand Tour depuis 1987 »

Le coureur de la Movistar confirme les espoirs placés en lui en remportant le Giro d’Italia l’année suivante. Bien que porteur du maillot rouge de leader, Quintana abandonne quatre mois plus tard sur chute la Vuelta sur laquelle on retrouve un plateau digne du Tour de France (Chris Froome, Alberto Contador, Joaquim Rodriguez, Alejandro Valverde). Au terme d’une saison 2014 très aboutie, Quintana devient donc le premier colombien à remporter un grand tour depuis Luis Herrera (Vuelta 1987).

En 2015, Nairo Quintana fait vaciller Chris Froome sur les pentes de l’Alpe d’Huez mais échoue à 1’12 de l’anglais. Sa victoire sur la Vuelta 2016 devant Froome (qui l’a à nouveau dominé sur le Tour) et Chavez marque l’apogée de la carrière du colombien qui de façon incompréhensible ne progressera plus à partir de cette date.

A partir de 2017, Nairo Quintana ne parvient plus à distancer qui que ce soit en montagne. Il est battu par Tom Dumoulin au printemps lors d’un Giro pourtant très montagneux en étant incapable de lâcher le néerlandais dans les Apennins ou les Dolomites. Il est humilié deux mois plus tard par Chris Froome sur le Tour qu’il finit à la 12ème place. Tout comme Luis Herrera au même âge*, Quintana ne joue plus les premiers rôles à partir de ses 26 ans.

En 2018 sur le Tour dont il a fait une priorité alors que Dumoulin et Froome ont couru un Giro exténuant, Quintana ne parvient toujours pas à surclasser ses adversaires en montagne malgré une préparation axée sur la grande boucle. Mais plus inquiétant, le colombien est le premier favori à sauter sur les pentes de l’Alpe d’Huez quand ses adversaires Bardet, Dumoulin, Nibali ou Roglic parviennent à rester dans la roue du train Sky. Quintana est décramponné alors que le(s) leader(s) de la Sky ne sont pas encore entrés en action. La même scène se reproduira dans l’Aubisque une semaine plus tard. Malgré un parcours taillé pour lui (Tour très montagneux, contre la montre individuel réduit au minimum sur un parcours accidenté qui offre un avantage moindre aux rouleurs, réintroduction du contre la montre par équipe qui sied à la Movistar), Quintana termine 10ème à 14’18 du vainqueur.

« Le fiasco Movistar »

Sa victoire au sommet du col du Portet reste un succès en trompe l’œil. A 15 kilomètres de l’arrivée, Quintana accélère et s’échappe du groupe maillot jaune. Le colombien qui ne représente plus une menace au général bénéficie d’un bon de sortie (une humiliation) de la part du mur blanc qui n’aurait jamais laissé partir Tom Dumoulin ou Primoz Roglic. La Vuelta qui s’élance de Malaga un mois plus tard offre à Quintana une seconde chance d’accrocher un grand Tour et de sauver sa saison. Ce Tour d’Espagne boudé par tous les cadors (Geraint Thomas, Chris Froome, Tom Dumoulin et Primoz Roglic) ne peut échapper au colombien. Mais à la veille de la dernière étape de montagne, Quintana est englué à une indigne 6ème place au classement général. Le grimpeur de la Movistar est devancé par des coureurs incarnant la nouvelle génération sans palmarès sur un grand tour (Simon Yates, Steven Kruijswijk, Enric Mas Nicolau, Miguel Angel Lopez) et un type ayant le même âge que Jeannie Longo (son équipier Alejandro Valverde). Contraint de se relever pour aider le maillot vert en difficulté dans le col de la Gallina après l’avoir fait sauter, Nairoman rétrograde à la 8ème place du classement général (aucune victoire d’étape de surcroit). Endossant un instant la robe d’avocat, on peut fustiger la gestion de l’équipe Movistar qui s’entête à aligner sur les grands tours une hydre à deux (Valverde -Quintana) puis à trois têtes (Quintana-Valverde-Landa) en renouvelant chaque année un schéma qui ne fonctionne pas. Le fiasco Movistar se traduit par le fait qu’aucun coureur de la formation n’ait porté de maillot de leader sur un grand Tour en 2018.

Nairo Quintana ne gagnera jamais le Tour de France et sera lui aussi victime de la malédiction du maillot à pois (Signal de Bisanne). Ses piètres qualités de rouleur, ses attaques devenues des pétards mouillés et l’avènement de la nouvelle génération (Tom Dumoulin, Primoz Roglic, Egan Bernal) en sont les principales raisons.

*Luis Herrera né en 1961 réalise la meilleure saison de sa carrière en 1987 : il remporte en mai la Vuelta et le maillot de meilleur grimpeur puis obtient son meilleur résultat sur le Tour de France (5ème) en juillet et un second maillot à pois.

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